Musicothérapie : quand la musique est bénéfique pour la santé

Selon le proverbe populaire, la musique adoucit les mœurs. Entendre par là qu’elle aurait des vertus éducatives et apaisantes. Par ailleurs, il a été scientifiquement établi qu’écouter un morceau musical, à son goût, est une source de plaisir qui agit sur le système de récompense du cerveau. La dopamine se libère, sécrétant des endorphines qui procurent une sensation de bien-être.

« L’Organisation mondiale de la Santé définit la santé comme un état complet de bien-être physique, mental et social. Partant de ce constat, si faire ou écouter de la musique nous aide à nous sentir bien, ce ne peut qu’être bon pour notre santé », souligne Aude Nyadanu, docteure en chimie organique, à la tête de Lowpital, agence d’innovation en santé.

L’entrepreneure nantaise est la responsable du pôle Innovation santé du projet Epilepsia Waves, concept expérimental associant musique et médecine, plus précisément dans le traitement de l’épilepsie. La musique est aussi l’outil de travail au quotidien d’Aude Menteaux, musicothérapeute clinicienne à l’Institut du cancer de Montpellier.

La musicothérapie améliore la qualité de vie du patient

Aude Menteaux définit la musicothérapie qu’elle pratique comme l’utilisation de la musique dans une démarche de soin, à un autre niveau que la détente ou la relaxation. « C’est une thérapie de soutien qui met en œuvre le sonore, le musical, écouté, joué, chanté… La musique, quel que soit le style, est alors un médiateur dans la relation soignant-soigné ». Elle n’est pas thérapeutique en tant que telle. C’est son utilisation dans la relation entre le patient et le thérapeute qui l’est.

La musicothérapie ne va pas guérir le patient. « Elle l’accompagne, le rééduque et surtout améliore sa qualité de vie. Par exemple, la séance de musicothérapie peut avoir comme objectif thérapeutique le soulagement de la douleur et ainsi venir en soutien des traitements médicamenteux ». Cette thérapie peut aider à mieux tolérer un traitement. L’attention du malade va alors se déporter ailleurs. « Le cerveau ne va plus se focaliser sur le symptôme mais sur la musique ».

Des séances individuelles ou en lien avec les soignants

La musicothérapie est utilisée dans le traitement d’une multitude de troubles et de maladies comme l’indique Aude Menteaux. « On travaille sur le psychique, le physique, la sphère cognitive… Cela peut concerner notamment la rééducation des patients qui ont une tumeur cérébrale impactant leur mémoire. La musicothérapie va aider à trouver de nouveaux fonctionnements pour limiter les pertes de mémoire et améliorer le quotidien ».

Chaque séance varie en fonction du profil du patient à qui on demande ses goûts musicaux. En principe, la musicothérapeute reçoit en séance individuelle, seule avec le patient, mais elle peut aussi intervenir en chirurgie, en soins intensifs ou encore en hôpital de jour pour accompagner les équipes de l’Institut du cancer de Montpellier. « Par exemple, mon intervention peut être utile lorsqu’une infirmière ou une aide-soignante effectuent un geste de soin qui va entraîner de l’inconfort pour le malade ».

La musicothérapie est reconnue en France mais pas réglementée

La musicothérapie est de plus en plus présente dans les centres médicaux, les Ehpad et les structures d’accueil des personnes en situation de handicap. Elle fait appel aux champs de la sensibilité et des émotions qui interpellent le plus grand nombre. Outil de médiation et de stimulation cognitive, elle permet, entre autres, d’améliorer l’humeur, la communication et l’autonomie des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer.

« La musicothérapie est reconnue en France sans quoi nous ne serions pas présents dans ces lieux qui reçoivent un public plus fragile. Or, la profession n’est pas réglementée », déplore Aude Menteaux, qui a suivi trois ans d’études à l’université Paul-Valéry de Montpellier avant d’être diplômée. « Certaines formations peu sérieuses proposent en un temps record de devenir musicothérapeute. Il faut rester vigilant ». Et se renseigner auprès de la Fédération française des musicothérapeutes qui œuvre pour plus de rigueur dans le métier et met à disposition, en ligne, un annuaire de professionnels.

Le pouvoir de la sonate de Mozart sur les crises d’épilepsie

Améliorer le quotidien des patients, c’est aussi l’un des buts du consortium engagé dans le projet Epilepsia Waves, dont fait partie Aude Nyadanu. « Notre objectif est la composition d’un répertoire musical pour prévenir et réduire les crises d’épilepsie sur les patients chez qui les médicaments ne fonctionnent pas ». L’idée a été initiée par Eva Menard, artiste créatrice du collectif Øpera. « Elle est épileptique et aucun traitement pharmacologique n’a eu d’effet concluant sur elle ».

L’association Épilepsie France et le professeur Fabrice Bartolomei, chef du service d'Épileptologie et rythmologie de l'hôpital de la Timone à Marseille, sont très investis dans ce programme novateur, qui s’appuie sur l’effet Mozart. Des études scientifiques ont démontré que l’écoute de la Sonate K448 pour deux pianos en ré majeur du compositeur autrichien pouvait avoir un effet bénéfique sur des patients souffrant d’épilepsie.

Composer un répertoire musical testé sur des patients épileptiques

À ce jour, les essais cliniques sur le sujet confortent l'impact du morceau en ré majeur de Mozart tout en excluant des centaines d'autres compositions. « Nous ambitionnons de composer un répertoire qui aurait les mêmes impacts que la sonate », confie la directrice de Lowpital. Le collectif Øpera, formé entre autres de musiciens, va s’atteler à cette tâche. « Ce ne sera pas forcément que de la musique classique ». Le projet, soutenu par Nantes Métropole, est officiellement lancé ce 20 janvier 2024.

« Nous avons procédé au préalable à une synthèse pointue de la littérature scientifique avant d’engager nos recherches musicologiques pour essayer de comprendre ce qui est particulier à cette sonate », précise Aude Nyadanu. Les musiques composées seront testées sur les patients épileptiques qui se déclareront volontaires. « Lorsque les résultats obtenus démontreront un impact positif, nous nous orienterons alors vers un essai thérapeutique plus complet et rigoureux supervisé par le professeur Bartolomei. »