Le paquet neutre rend le tabac moins attractif

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Par Patricia Guipponi

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Santé Publique France a publié les baromètres de perception du produit avant et après sa mise en circulation sur le marché. Le nouvel emballage séduit moins les jeunes, gênés de le sortir.

Depuis le 1er janvier 2017, l’habillage du paquet de cigarettes manufacturées et du paquet de tabac à rouler a changé d’aspect. Il est vert foncé. Dénué de tout logo publicitaire, si ce n’est la marque du produit écrite dans une typographie standard, au corps de lettre bien plus petit que celui employé pour les avertissements sanitaires qui occupent 65 % de sa surface : « Fumer tue », « Fumer augmente le risque de devenir aveugle », « Fumer nuit à vos poumons ».

En son centre, une image choc accompagne le message de santé publique diffusé. Il se veut neutre. Sans les coloris et iconographies des cigarettiers. Le but est de réduire l’attractivité du produit, d’éliminer l’effet de conditionnement du tabac en tant que forme de promotion et de publicité, avec bien entendu la finalité d’en freiner la consommation, d’éviter que les jeunes se laissent tenter.

Moins d’impact sur les gros consommateurs

Début 2019, Santé Publique France a publié les baromètres* de perception de ce paquet par les fumeurs avant et après sa mise en circulation. Le nouveau paquet ne plaît qu’à 16 % des sondés, comparé aux 53 % séduits par l’ancien emballage. Par ailleurs, entre l’avant et l’après mise sur le marché du paquet neutre, les personnes gênées de sortir leur tabac en public sont deux fois plus nombreuses, surtout chez les 18-24 ans.

Le nouveau conditionnement engendre une baisse importante de l’attractivité du paquet chez les jeunes adultes, et ce indépendamment des différences socio-économiques. Montrer son paquet embarrasse surtout les femmes et les petits fumeurs. En revanche, cela a moins d’impact sur les gros consommateurs.

Les chiffres avancés peuvent paraître encore faibles (12 % de gène en 2017 contre 6 % en 2016), et le paquet neutre entre dans tout un dispositif de mesures fortes prises pour lutter contre le tabagisme. Néanmoins, sa standardisation a contribué, selon Santé Publique France, à dénormaliser la cigarette.

* L’enquête téléphonique a été menée sur 15 216 et 25 319 individus, représentatifs de la population des 15-75 ans en 2016 et des 18-75 ans en 2017, résidant en France métropolitaine et parlant le français.

« On se dirige vers un futur de générations sans nicotine »

Trois questions au Professeur Bertrand Dautzenberg, tabacologue à l’institut Arthur-Vernes, Paris 6e.

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Crédit : DR

Que retirez-vous des baromètres publiés par Santé Publique France ?

Chez les jeunes, il y a une diminution importante de l’attrait du paquet de cigarettes. Quand on commence à leurs âges, en tant que pré-fumeurs, on est surtout attiré par l’esthétique du paquet. C’est comme lorsqu’ils achètent des baskets, il faut de la marque et que cela se voit. Sinon, ça n’a aucun intérêt. Retirer le logo des fabricants a un effet conséquent. En revanche, lorsque l’on s’adresse à la catégorie des gros fumeurs, les effets sont beaucoup plus modérés. La majorité d’entre eux se fiche de l’emballage. Ce qui les intéresse, c’est ce qu’il y a à l’intérieur du paquet, le produit en lui-même.

Les effets recherchés par le paquet neutre sont-ils satisfaits ?
Oui, car le fait de rendre les paquets neutres remet en question l’entrée dans le tabac et l’axe premier recherché était de protéger les jeunes en évitant qu’ils y plongent dedans. Donc, on peut dire que ça marche. Mais le paquet neutre n’est pas la seule mesure qui porte ses fruits. Le rôle de la cigarette électronique est aussi important dans cette lutte contre le tabagisme. Les jeunes de moins de 25 ans l’ont adoptée. C’est un concurrent sérieux du tabac. On a moins de jeunes gens qui fument des cigarettes classiques. On se dirige vers un futur de générations sans nicotine.

À lire aussi : Cigarette électronique : le point avec le Professeur Dautzenberg

Notre précédente interview sur la e-cigarette.

L’image du tabac en a donc pâti ?

Toutes les mesures prises ont des conséquences visibles sur le combat contre le tabac. Le 1er mars 2019, le paquet a subi une nouvelle hausse des prix. Il y aura forcément des répercussions. Il y a aussi un élément nouveau qui a fait, et continuera à faire baisser, le nombre de consommateurs, c’est le remboursement, selon le régime général des médicaments d’arrêt, sans avancer les frais. L’image du tabac est maintenant dégradée. La cigarette ne plaît plus. C’est un produit sale qui pollue notre santé et notre planète.

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