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Ressourceries et recycleries : le marché de l’occasion solidaire
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À l’heure de la crise économique et écologique, de la prise de conscience qu’un autre mode de consommation doit s’imposer, les ressourceries et recycleries gagnent du terrain. Selon les chiffres les plus récents, avancés par l’Ademe (l’Agence de la transition écologique), la France en comptait 2 400, réparties sur tout le territoire en 2017.
En 2020, le Réseau national des Ressourceries et Recycleries s’est constitué (RNRR). Il est aujourd’hui fort de 232 adhérents, du label Emmaüs aux associations d’économie sociale et solidaire, en passant par le Cercle national du recyclage. « Notre première mission est de faire avancer la cause du réemploi solidaire et non lucratif », explique Catherine Mechkour-Di Maria, secrétaire générale du RNRR.
Les ressourceries sont « généralistes ». C’est-à-dire qu’elles récupèrent sur un territoire donné tous les objets dont les habitants veulent se défaire pour les remettre en état avant de les reproposer au public. Parmi ces biens de seconde main, on trouve de l’électroménager, de la vaisselle, des livres ou encore du mobilier. « La recyclerie va plutôt être spécialisée dans un type de flux : le textile, le jouet… », précise Catherine Mechkour-Di Maria. De ce fait, elle dispose d’un niveau de professionnalisme dans la réparation de ce produit bien spécifique.
Des emplois aidés et non délocalisables
Les ressourceries et recycleries sont à but non lucratif et majoritairement structurées en association. Elles revendiquent quatre fonctions essentielles. Elles collectent les produits dont les usagers n’ont plus besoin, les valorisent (tri, nettoyage, réparation…), les redistribuent tout en sensibilisant le grand public à la surproduction et la surconsommation. En 2021, sur 50 000 tonnes d’objets d’occasion récupérés, 20 000 ont pu être remises sur le marché.
Les ressourceries et recycleries répondent à un besoin socio-économique. « Elles proposent des produits d’occasion, à prix moins élevés adaptés aux foyers modestes. De surcroît, elles contribuent à l’emploi non délocalisable sur un territoire », remarque Christophe Marquet en charge de l’animation nationale Réemploi et réparation - 2nd vie des produits à l’Ademe, l’Agence de la transition écologique. Il s’agit souvent d’insertion, de retour à l’emploi de populations éloignées du marché du travail.
Emmaüs se positionne comme « le grand frère » de ces structures en matière de réemploi solidaire. « Mais il faut le distinguer des ressourceries qui ont émergé dans les années quatre-vingt-dix. Elles ont un angle environnemental de réduction des déchets très fort. Tandis que la volonté initiale de l’Abbé Pierre était de lutter contre la pauvreté », analyse Catherine Mechkour-Di Maria.
Le prix du foncier fragilise l’existence des ressourceries
L’implantation des ressourceries et recycleries n’est régie par aucune règle. Les territoires les plus modestes n’en disposent pas forcément. Certains recensent plusieurs ressourceries. D’autres aucune. Question de volonté, d’implication, d’état d’esprit. « Il peut arriver qu’une collectivité territoriale porte ce projet mais rien ne les y oblige. Toutefois, c’est ce que nous leur recommandons pour saisir le coche de l’économie circulaire », confie Christophe Marquet de l’Agence de la transition écologique.
Ce n’est pas parce qu’elles ont le vent en poupe que les ressourceries sont pérennes. Elles s’unissent parfois au sein d’un territoire pour être plus fortes. C’est le cas en Bretagne, où 119 d’entre elles se sont fédérées en réseau pour résister, notamment face aux acteurs privés (industriels du textile, sites marchands sur le Net…). Ces derniers se positionnent avec de gros moyens sur le marché de l’occasion. Par leur biais, les particuliers peuvent revendre ce dont ils n’ont plus besoin. « Cela leur rapporte un peu d’argent ce qui n’est pas négligeable en ces temps difficiles. Cependant, à la différence des ressourceries, les sites de revente ne répondent pas à un souci d’économie sociale et solidaire », souligne Christophe Marquet.
Autre cause de fragilisation des ressourceries : le foncier. Beaucoup de structures sont locataires et menacées de mettre la clé sous la porte pour cause de loyers trop onéreux. « Sans ce problème, notre modèle économique serait plus stable », déplore Catherine Mechkour-Di Maria. Par ailleurs, l’effet « bon marché » des produits proposés en ressourcerie peut s’avérer pervers. « On peut être tenté d’acheter cinq paires de jeans car elles reviennent au prix d’une neuve. Donc de surconsommer. Il faut toujours se demander quels sont nos réels besoins ».
Pour aller plus loin, le site de l’Ademe (Agence de la transition écologique) dresse un panorama de l’économie circulaire et de ces ressourceries.
Que dit la loi anti-gaspillage ?
La loi anti-gaspillage, ou loi Agec, a fêté ses trois ans en février 2023. Elle vise à transformer l’économie linéaire du « produire, consommer, jeter » en une économie circulaire de lutte contre le gaspillage et d’instauration du réemploi solidaire. Cette loi se décline en plusieurs axes, dont le mieux produire, la fin du plastique jetable, de l’obsolescence programmée…
Des mesures pour y parvenir sont prévues entre 2023 et 2025 dans les domaines du textile, des restes alimentaires ou encore de l’écoconstruction. Un vaste chantier auquel le Réseau national des Ressourceries et des Recycleries entend pleinement participer et « pour lequel il a toute légitimité », commente Catherine Mechkour-Di Maria, sa secrétaire générale. Rappelons qu’actuellement, un Français produit en moyenne 350 kg de déchets ménagers chaque année. Seuls 26 % sont recyclés.
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