Florence Clément (Ademe) : « Les produits mauvais pour la santé le sont aussi pour l’environnement »

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Angélique Pineau-Hamaguchi

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Protéger la planète contribue également à préserver notre santé. Mais les Français sont-ils pour autant prêts à changer leurs habitudes ? L’éclairage de Florence Clément, responsable de l’information à l’Ademe, l’Agence de la transition écologique.

Événements climatiques, pollution de l’air, diminution des ressources naturelles et en particulier de l’eau, développement des épidémies, effets des perturbateurs endocriniens… Les liens entre environnement et santé nous apparaissent de plus en plus étroits. Une prise de conscience semble avoir lieu chez les Français. Mais est-elle suffisante pour nous pousser à revoir nos façons de vivre et de consommer ?

Florence Clément est responsable de l’information à l’Ademe, l’Agence de la transition écologique. Elle revient pour nous sur les obstacles qui freinent le passage à l’action mais montre aussi qu’il existe des solutions.

 

L’impact sur la santé plus visible qu’avant

Les Français sont-ils plus au fait des conséquences de la dégradation de l’environnement sur leur santé et leur qualité de vie ?

Florence Clément : Ces dernières années, la succession de tempêtes, de fortes pluies entraînant des crues et des inondations, de sécheresses et de canicules a généré une prise de conscience de l’impact du changement climatique sur nos vies. Les Français font désormais le lien entre environnement et santé. Ils savent que les canicules sont très dangereuses pour les personnes fragiles ou que la mauvaise qualité de l’air augmente les risques de décès prématuré lié aux maladies cardiovasculaires par exemple.

En revanche, ils voient moins l’impact de l’environnement sur le bien-être. Vivre dans un lieu urbain, où la nature n’a pas vraiment sa place, a pourtant des effets sur la santé mentale. D’ailleurs, plutôt que de subir son environnement, il vaut mieux se réapproprier les espaces urbains, en contribuant par exemple à construire des lieux de vie plus agréables et basés sur la solidarité, comme les jardins partagés ou encore la végétalisation d’espaces publics, en participant à la création et l’animation de tiers-lieux, etc.

Revoir notre façon de consommer

Pour autant, les Français sont-ils réellement prêts à changer leurs habitudes ?

F.C. : 72 % considèrent que les conditions de vie deviendront extrêmement pénibles d’ici une cinquantaine d’années. Et plus de 60 % estiment qu’il faudra par conséquent modifier de façon importante nos modes de vie, comme nous l’apprend notre baromètre 2022. Toutefois, il y a souvent une différence notable entre la prise de conscience et le passage à l’action.

D’ailleurs, quand on sonde certaines personnes sur leurs actions pour préserver l’environnement, les réponses font souvent part de gestes assez basiques et peu engageants comme le fait de trier ses déchets ou de ne pas jeter de déchets par terre. Et c’est une très bonne chose, c’est un acte citoyen, mais il faudrait aller beaucoup plus loin.

Quand, autour de vous, tout vous pousse à consommer, il n’est pas évident de changer. Pourtant, il est essentiel de s’interroger sur son besoin réel, sur le désencombrement de son habitat qui apporte souvent beaucoup de satisfaction comme le montre notre étude « osez changer ». Les foyers observés ont gagné en moyenne 30 % de place chez eux en se débarrassant du surplus et affirment avoir nettement gagné en bien-être.

Même les jeunes, qui semblent plus engagés, restent de gros consommateurs en réalité. Pour eux, le marché de l’occasion par exemple est parfois une façon d’acheter davantage d’objets, qu’ils pourront revendre vite, et non une priorité pour préserver les ressources de la planète. Ils savent qu’il est nécessaire de changer de mode de vie mais se sentent perdus sur les actions à réaliser. Ils ont besoin d’être accompagnés dans la transition écologique tout autant que leurs aînés. C’est pour cela que l’Ademe a créé pour eux un site avec plus de 130 idées d’actions à leur portée : mtaterre.fr.

Tous les Français ont besoin d’être accompagnés dans leur transition et de trouver des actions concrètes adaptées à leur mode de vie.

Des guides pour limiter son empreinte écologique

Comment connaître ces actions concrètes ?

F.C. : L’Ademe publie régulièrement des guides pratiques à destination du grand public. C’est le cas par exemple, en 2023, de Préserver sa santé et la planète, coédité avec Harmonie Mutuelle. Celui-ci recense les bonnes pratiques pour préserver sa santé et protéger celle de la planète. Il donne notamment des conseils pour faire évoluer son alimentation, revoir les produits que l’on utilise à la maison (hygiène, ménage…) et au jardin ou encore changer sa manière de se déplacer.

D’ailleurs, il montre bien que les produits mauvais pour notre santé (aliments ultra-transformés qui contiennent des additifs, produits d’hygiène et de nettoyage avec des perturbateurs endocriniens…) sont aussi néfastes pour l’environnement.

Des guides pour différents publics

L’Ademe édite également des guides thématiques, destinés par exemple aux jeunes ou aux parents. Avec des conseils plus personnalisés et un ton adapté. Celui pour les collégiens, les lycéens et les étudiants (Comment agir pour ma planète ?) aborde notamment les bonnes pratiques en matière de shopping et de numérique. Quant à celui pour les parents, 1 001 idées écologiques avec les enfants, il évoque entre autres le contenu du cartable, le trajet entre la maison et l'école, le goûter, les vêtements… Tous deux ont été publiés en 2023.

Ce qui est meilleur pour la santé n’est pas toujours plus cher

Est-ce vraiment toujours plus coûteux de mieux consommer ?

F.C. : Si on prend l’exemple de l’alimentation, si vous souhaitez manger très souvent de la viande avec un label bio ou de qualité ainsi que des fruits et légumes sans vous préoccuper de la saison, vous risquez d’augmenter votre budget. Mais si vous changez vos habitudes, en réduisant la viande et en augmentant les légumineuses notamment, en consommant le plus possible de fruits et légumes de saison, tout en achetant plus de produits bio, alors vous pouvez équilibrer votre budget. D’autant plus que ne pas consommer de viande à chaque repas et limiter la charcuterie, c’est bon pour la santé.

Par ailleurs, de nombreuses marques de distributeurs se sont mises au bio, en particulier pour l’épicerie. Et quand on compare des produits équivalents, ce n’est pas forcément plus cher.

Quant aux produits de nettoyage et d’hygiène, « le mieux » est encore « le moins ». Pour préserver sa santé et limiter son impact sur l’environnement, il est préférable d’utiliser le moins de produits chimiques et odorants possible et de revenir à des produits « bruts » avec peu de composants. Ce qui reviendra aussi moins cher. Il vaut mieux se méfier de tout ce qui sent bon, des produits très parfumés. Une maison saine, c’est une maison qui ne sent rien !

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  • Santé environnementale

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